Saveurs
Revisiter les traditions de l’érable, selon Vincent Dion-Lavallée
Par Marie-Catherine Goudreau
Le temps des sucres, c’est une tradition bien ancrée au Québec. Pour Vincent Dion-Lavallée, chef exécutif et copropriétaire de la Cabane d’à côté à Mirabel, c’est aussi un moment pour rendre hommage à la cuisine d’érable. Entre souvenirs d’enfance et innovations culinaires, il nous raconte sa façon de célébrer cette période sucrée.
Qu’est-ce que représente le temps des sucres au Québec pour toi?
Quand j’étais jeune, au temps de Pâques, on se réunissait souvent en famille, on allait en Beauce et mon grand-père bouillait du sirop pour faire de la tire pour les enfants. Je n’ai jamais eu, par exemple, d’oncle qui possédait une cabane à sucre, mais on se rendait dans des cabanes à sucre commerciales et c’était super bon!
Mon lien avec les cabanes à sucre s’est vraiment concrétisé quand j’ai commencé à travailler Au Pied de Cochon. Maintenant, ça fait partie de mon histoire!
Aujourd’hui, le temps des sucres, pour moi, c’est surtout de faire à manger et de servir les clients, puisqu’on a deux cabanes qui opèrent en même temps. Puis, on a 10 000 entailles sur des érables qui coulent chaque année. On bouille notre sirop et j’adore ça! J’aime aussi amener mes enfants à la cabane pour qu’ils vivent cela.
Ce moment de l’année concorde aussi avec le temps du crabe et des huîtres. Je rends cela à ma façon. Il y a toujours de la soupe aux pois, des bines, du jambon! Ça reste qu’au temps des sucres, on a envie de manger ce qu’on mange une fois par année.

Crédit : Scott Usheroff
Comment as-tu appris sur la cuisine de cabane à sucre avec la Cabane Au Pied de Cochon?
On a toujours été des ambassadeurs du terroir, mais on a emmené les repas de cabane à un autre niveau. On a mis du foie gras, du canard, du homard, de l’esturgeon; name it! Puis, on a réussi à faire les plus belles associations entre le salé et le sirop d’érable.
On a tellement vécu d’années et d’émotions qu’il y a eu un moment où on était un peu tannés de la tradition. Mais la tradition est tellement forte au Québec par rapport au temps des sucres! Les plats emblématiques et traditionnels refont toujours surface. Et depuis qu’on a la Cabane d’à côté, plus que jamais, j’ai ce désir et ce regain de les mettre en valeur et en avant. C’est-à-dire, de faire un jambon, mais le meilleur jambon, de faire des crêpes, mais les meilleures crêpes possibles au sirop d’érable, de faire le meilleur bacon, les meilleures oreilles de crisse. Toutes ces choses qui font la différence et qui font plaisir aux Québécois.
On a la chance d’avoir une clientèle qui nous suit dans toutes nos folies. Mais parfois, on a juste un désir de revenir vers quelque chose d’un peu plus simple, de revenir vers nos racines.

Crédit : Scott Usheroff
À quoi ressemble le temps des sucres à la Cabane d’à côté et Au Pied de Cochon?
C’est une vraie fourmilière! Ce sont une cinquantaine d’employés qui travaillent en même temps. Il y a tous ceux qui travaillent en cuisine, les gens qui préparent les boîtes pour emporter, les serveurs, ceux qui travaillent dans le bois, en plus l’évaporateur qui fonctionne au milieu… La cabane roule pas loin de 20 heures par jour! C’est un rythme incroyable qu’on tient pendant environ 13 semaines.
On fait ça pour le plaisir, pour créer des souvenirs et des moments. À la cabane, Au Pied de Cochon, c’est plus grand, on accueille plus de monde, alors qu’à la Cabane d’à côté, c’est plus petit, intime, comme si tu rentrais dans une cabane à sucre familiale. Les deux cabanes se complètent bien.
Le temps des sucres, c’est aléatoire. Parfois ça dure un mois, parfois deux. Ça dépend des saisons. C’est une fois par année – et tu ne sais jamais quand ça commence, ni quand ça finit. C’est le résultat d’une année de travail dans le bois, de taillage, de nettoyage, d’identification d’arbres. Tout ce temps-là, tu le capitalises en très peu de semaines et on sait qu’il arrive souvent des pépins! Mais l’objectif reste d’avoir un sirop de qualité en grande quantité.
Pour moi, c’est la plus belle saison de l’année! Quand est-ce que tu peux te permettre de boire de l’eau d’érable directement de l’évaporateur? Un Québécois qui boit du sirop d’érable chaud, c’est inné en lui, c’est dans ses racines.
Quels sont les meilleurs plats durant le temps des sucres selon toi?
Dès que le temps des sucres commence, j’ai envie de manger une soupe aux pois! Quand je commence à entailler, à travailler dehors, lorsque c’est un peu plus physique, qu’il fait froid, je me sers une soupe aux pois, bien chaude et épaissie. C’est le réconfort ultime! C’est salé, c’est gras, c’est juste parfait.
La tire est aussi un incontournable, surtout avec mes enfants. D’avoir le cache-cou tout collé, un manteau scrap de tire : ce sont les plus beaux moments!
Et évidemment, les crêpes dans le sirop – que tu peux manger à ne plus finir. Tu ne comptes pas les calories : tu fais juste les manger et tu es heureux!

Crédit : Scott Usheroff
Quels sont tes conseils pour cuisiner l’érable?
Ne pas avoir peur de l’utiliser! On a accès au plus beau sucre au monde, et souvent on a peur de substituer le sucre blanc de notre recette par du sucre d’érable ou du sirop d’érable. C’est sûr que ça coûte un peu plus cher, mais il faut oser faire des recettes avec cet ingrédient : c’est tellement meilleur! Il faut créer ses propres recettes à la maison et ne pas hésiter à le cuisiner, d’autant plus si on a quelqu’un proche qui en produit.
Selon toi, comment la place de l’érable a évolué dans la gastronomie québécoise au fil des années?
Je pense que Martin [Picard] a été assez visionnaire. Chaque fois qu’il s’est parti un de ses restaurants, tout le monde le déconseillait. Mais il a toujours fait à sa tête et a été un précurseur. Bien qu’il n’ait pas inventé la cuisine avec l’érable, je crois qu’il lui a redonné un peu ses lettres de noblesse. C’est ce qui a fait que d’autres gens ont suivi cette tendance. La suite, ça a été comme une révolution.

Crédit : Scott Usheroff
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