Portrait
Kinya Ishikawa: trouver son équilibre
À près de 80 ans, le potier Kinya Ishikawa a été fait membre de l’Ordre des arts et des lettres du Québec. Le fondateur de 1001 pots a également passé le flambeau de l’organisation de son événement à de nouveaux propriétaires. Alors que Val-David célèbre son Centenaire, cette année a déjà pris les couleurs de la transmission pour le créateur.
C’est dans la simplicité que se trouve l’équilibre. Cette phrase pourrait résumer à elle seule ce qui guide le potier – il préfère ce terme à celui de céramiste -, tant dans sa vie personnelle que professionnelle. Tout est une question d’harmonie au fond. « Le travail de l’artisan, c’est comme une fleur sauvage qui pousse dans la nature. Ça prend le bon endroit pour qu’elle pousse. Si le climat n’est pas adéquat, elle va disparaître très rapidement. Nous avons besoin d’une proximité avec le marché, car il faut vivre de notre travail, mais en même temps il faut garder une certaine distance avec lui, dit-il. Et s’il y a juste une fleur, c’est moins beau. Quand il y a un champ, là, ça devient intéressant. C’est ça 1001 pots: une communauté de céramistes regroupés au bon endroit. Val-David est un lieu qui offre une visibilité à l’art dans la nature, sans être trop éloigné de la ville. »
Il y a 32 ans maintenant que le natif de Tokyo, au Japon, a démarré son projet de communauté. L’événement a grandi tranquillement au fil du temps, avant de devenir la plus grande manifestation d’art céramique en Amérique du Nord, amenant une reconnaissance outremer à son créateur, reconnu aujourd’hui internationalement en tant que maître de sa discipline.
Développer son propre langage
Arrivé au Québec à 25 ans après une carrière au sein de l’équipe olympique japonaise de bobsleigh et un passé de designer de vêtements, il se trouve un emploi de concierge dans une école de poterie à Montréal. « Je n’avais pas un sou et je ne connaissais rien au métier. Alors j’ai demandé la permission d’utiliser le matériel de l’école quand j’avais fini le ménage. C’est comme ça que j’ai appris la technique et que j’ai développé ma façon de faire, de m’exprimer. » Une façon qui lui est propre, à la jonction de sa culture natale et de sa vie québécoise, qu’il a aussi déclinée dans la sphère personnelle.
Marie-Andrée, sa conjointe et complice de toujours, est atteinte de surdité. À son arrivée au Québec, il ne parlait pas français, un peu anglais et ne connaissait pas le langage des signes. « J’étais toujours à la bibliothèque ou au parc, car c’étaient les seuls endroits gratuits à fréquenter. » Et puis un jour, une bibliothécaire qui travaillait à l’Université du Québec à Montréal attire son attention, au parc Lafontaine. « Elle écrivait un mot en anglais sur un papier puis je traduisais avec un dictionnaire japonais. Je lui répondais par écrit et elle traduisait à son tour. C’était compliqué, mais nous avons fini par créer notre langue des signes à nous. »
Rendre son utilité à la poterie
« L’artisan peut présenter seul son travail, mais en groupe, ça devient un mouvement. Et c’est important, car la poterie n’est pas si connue ici. Souvent, on achète une pièce de céramique comme souvenir, par exemple une assiette qu’on met au mur, mais la majorité de la poterie est faite pour être utile dans la vie de tous les jours. C’est comme une paire de pantalons. Au début, elle est neuve, elle n’est pas confortable, mais avec le temps elle se moule à ton corps. Et tu ne l’accroches pas dans le salon, mais dans la garde-robe. C’est la même chose pour la poterie, il faut l’utiliser tous les jours. Au début, l’objet n’est pas confortable, car il a été fait à la main, pas de façon industrielle; il n’est pas standard, il est unique dans ses détails. Et c’est toi qui le choisis. Avec le temps, tu t’y habitues. Comme les vêtements, tu as ton objet préféré pour tel ou tel moment de la vie quotidienne. Notre art n’est pas que décoratif. Il reflète le travail d’un artisan qui meuble de façon utile le quotidien, qui lui donne un sens », explique M. Ishikawa.
L’œuvre d’une vie
Kinya Ishikawa est un homme humble qui préfère être à l’arrière-plan, dont le quotidien continu d’être façonné par la constance du travail. Sur le site de 1001 pots se trouve le Jardin de Silice, un lieu aménagé à son image, grandiose, mais sobre, créatif, unique, loin des clichés américanisés de la culture japonaise, mais qui en intègre le sens des perspectives et l’équilibre des formes. Une « salle communautaire de potiers » dont les murs sont emplis de tessons de poterie qui s’agglutinent et « qui sont une mémoire de notre époque ». Il lui a fallu 15 ans pour le bâtir « et ce n’est pas encore fini ». D’ailleurs, son atelier se trouve à quelques pas du jardin. Et le potier souhaite y travailler jusqu’à la fin de ses jours. « Mais pour 1001 pots, il est temps que l’événement sorte de mon ombre et qu’il poursuive son chemin. »
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