Secteur Fortin
Une cohabitation nécessaire entre foresterie et activités de plein air
Des sentiers pédestres gérés par des organismes de plein air traversent des terres publiques aux limites de Lac-Supérieur et Val-des-Lacs. L’annonce de coupes forestières dans le secteur Fortin est-elle une menace pour ceux-ci?
Qui dit mieux? Le secteur Fortin, situé sur le territoire de Val-des-Lacs, a été adjugé le 12 mai dernier par un mécanisme de vente aux enchères tenu par le Bureau de mise en marché des bois (BMMB). Caroline Bujold, conseillère en communication pour le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (MFFP), explique la situation : « Nous ne connaissons pas les intentions de l’acheteur pour le moment. La récolte peut se faire sur plusieurs années. Aucune restriction n’empêcherait des travaux de débuter au cours de l’été. »
Or, ce secteur est aussi utilisé par des randonneurs. Les sentiers gérés par Accès Nature Laurentides, l’Inter-Centre ainsi que l’UQAM utilisent ces mêmes terres publiques.
Pas l’idéal
« La coupe forestière, ce n’est pas l’idéal pour nos sentiers, mais d’un autre côté, la foresterie est un pôle important au Québec », exprime Serge Lacroix, président d’Accès Nature Laurentides (ANL). Plus tôt ce printemps, il s’est joint par visioconférence à ses homologues afin de discuter de cet enjeu avec le MFFP. Dans le cadre de cette consultation, ces gestionnaires de réseaux de sentiers ont pu lui faire part de leur « liste d’épicerie ».
Serge Lacroix explique ce qu’il a obtenu : « En ce qui concerne [notre réseau], le secteur du lac Ti-Gris a été retiré de la coupe ainsi qu’une section de la Grande Boucle Tremblant, laquelle sera protégée avec une bande de 10 mètres. »
« À l’Inter-Centre, on vit avec les coupes forestières depuis les années 1970. C’est une cohabitation qui est correcte. Parfaite? Non. »
– André Marcoux, président d’Inter-Centre.
De son côté, le président d’Inter-Centre, André Marcoux, explique que ses sentiers ne seront pas impactés par les coupes prévues. Toutefois, il a obtenu une protection sur son réseau de 30 mètres de part et d’autre du Sentier National au Québec. Selon lui, c’est le réseau de l’UQAM qui aurait moins bien tiré son épingle du jeu. Celui-ci n’a pas répondu à nos demandes d’entrevue.
Toujours une menace
Gregory Flayol, directeur adjoint de Rando Québec et coordonnateur du Sentier National au Québec, se fait plutôt critique envers cette cohabitation. « C’est toujours une menace, dit-il. On laisse des bandes de forêt le long des sentiers, mais avec le vent et les systèmes racinaires entremêlés, les arbres tombent. Moi, c’est 100 mètres que j’ai demandés au MFFP. […] Mais c’est toujours pareil: ça demande une maîtrise en foresterie pour comprendre les discussions à la Table GIRT [de gestion intégrée des ressources et du territoire] et à la fin, on doit se partager les restes. Aujourd’hui, ce n’est pas acceptable qu’on gère avec des idées des années 1970. »
Coupes partielles
Au MFFP, on indique que le processus de vérification et de gestion contractuel est en cours pour le secteur Fortin. Donc, l’identité de l’acheteur n’a pas encore été divulguée. Il se pourrait que ce forestier ne soit pas local, souligne André Marcoux, et qu’il ne soit pas au fait des enjeux récréatifs du secteur. Les coupes autorisées seront partielles. La date de fin de contrat est le 31 août 2023.
De son côté, une citoyenne de Lac-Supérieur a amorcé une campagne de financement sur la plateforme GoFundMe. Joanne Strübel tente d’amasser 25 000$ afin de payer les honoraires d’un avocat. « Le ministère des Forêts est plutôt la voix de l’industrie forestière et le ministère de l’Environnement n’arrive pas à faire le poids contre lui. Il nous faut donc un arbitre qui puisse trancher en faveur de l’intérêt commun », écrit-elle. Madame Strübel souhaite stopper les coupes forestières dans ce secteur.
« Tout le monde est assis sur une chaise en bois. […] On veut soutenir la communauté des moulins à scie, mais il faut bien le faire », conclut André Marcoux, d’Inter-Centre.
EN EXTRA
Qu’est-ce qu’une coupe partielle ?
La coupe partielle consiste pour le forestier à prélever de 25% à 50% de la forêt dans un secteur donné. Cette coupe vise à la fois à récolter, améliorer et régénérer le peuplement d’arbres. En éclaircissant la forêt, la lumière accède au sol pour les essences tolérantes à l’ombre, telles que le bouleau jaune (merisier), l’érable à sucre et le thuya occidental (cèdre). Il existe plusieurs types de coupes partielles: coupe de jardinage, coupe partielle irrégulière et coupe progressive.
Source: Travaux forestiers: définitions et illustrations (MFFP).
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