Afin de « donner une chance à la biodiversité »
Un moratoire sur l’épandage du Bti est demandé
La Coalition Biodiversité - Non au Bti, appuyée de 22 organismes, a fait suivre une demande de moratoire sur l’épandage du larvicide Bti au ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC). Le Bti étant pulvérisé sur plusieurs milliers d’hectares dans une quarantaine de municipalités au Québec, dont plusieurs des Laurentides, elle interpelle directement le ministre Benoit Charette.
Le communiqué envoyé dans les médias avance que « toutes les espèces d’oiseaux insectivores sont en situation préoccupante. Tous les indices pointent vers l’effondrement des populations d’insectes pour expliquer cette situation. Or, la science l’a démontré à maintes reprises, le Bti engendre des impacts directs sur les chironomes, ces insectes non piqueurs à la base des écosystèmes aquatiques. Nous sommes choqués de l’inaction la plus complète du gouvernement dans le dossier Bti, en dépit de la multitude d’études qui sonnent l’alarme de toutes parts ». Le groupe environnementalaccuse également le MELCC de toujours émettre des autorisations aux municipalités qui en font la demande.
Christiane Bernier, du Réseau des femmes en environnement, est co-porte-parole de la Coalition Biodiversité. En entrevue avec L’info, elle explique que « plusieurs études disponibles, ici comme en Europe, sonnent l’alerte sur le fait que le Bti n’est pas aussi inoffensif qu’on le dépeint, que des études prouvent qu’il y a des effets secondaires, des effets indirects sur les insectivores ou des effets directs sur les batraciens. On demande donc un moratoire pour que tout ça soit plus clair. Comme dans n’importe quoi, il y a des études pour ou contre. Actuellement, ça tergiverse. Par mesure de précaution, on demande de suspendre l’épandage afin que se fassent des études ».
Au début de 2019, dans un rapport non public, le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (MFFP) recommandait au MELCC qu’il fallait user du principe de précaution face au larvicide, préconisant plutôt les méthodes de protection personnelle de l’usage courant pour la population exposée aux bestioles. Sinon, elle recommandait « de faire appel aux bornes antimoustiques », qui sont, selon la Coalition Biodiversité, « beaucoup moins dommageables pour les écosystèmes et beaucoup moins coûteuses pour les citoyens ».
Reverra-t-on la façon de gérer l’épandage du Bti?
L’épandage du Bti sur les plans d’eau n’en est pas à sa première controverse, mais le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (MFFP) n’est toujours pas prêt à trancher si ce produit est nocif ou non pour l’environnement.
Dans un document interne publié en janvier 2019 intitulé: « Orientation relative au contrôle des insectes piqueurs à l’aide du Bacillus thuringiesis variété israelensis (Bti) et Bacillus sphaericus (Bsph) », le MFFP fait un important travail de synthèse de la littérature scientifique existante à ce sujet, mais celle-ci est contradictoire. « Le manque d’études canadiennes sur les effets du Bti sur la faune et sur la chaine trophique rend la prise de position délicate pour le MFFP », conclut le ministère dans ce rapport, face à ces importantes contradictions entre les études.
« La littérature démontre que les chironomes et les amphibiens sont les espèces non visées les plus susceptibles d’être affectées par l’épandage de Bti », avance le rapport. On précise que les larves de chironomes (diptères) aux premiers stades sont affectées par les épandages et que l’émergence du diptère en question peut être énormément réduite selon les stades et les espèces présentes dans les zones humides arrosées au Bti.
Des études récentes, citées dans le rapport, avancent par ailleurs que certaines formulations de Bti peuvent avoir des impacts physiologiques sur des têtards et d’autres populations fauniques se nourrissant d’insectes.
Des alternatives?
Qu’en est-il des méthodes alternatives au Bti? En présence d’amphibiens, « il est recommandé d’utiliser des méthodes alternatives et économiques pour les municipalités, telles que des pièges à moustiques qui réduisent les densités des moustiques piqueurs localement », observe-t-on dans le document.
Le MFFP revient aussi sur la protection individuelle contre les moustiques et mouches, comme l’application d’insectifuges, les vêtements longs et clairs ainsi que les filets.
Toujours sans réponse
Depuis juillet 2020, L’info a tenté d’obtenir un commentaire du ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs sur ce rapport, mais sans succès. On attend toujours.
Qu’est-ce que le Bti déjà?
Rappelons que le Bti est un agent de lutte biologique pour le contrôle des insectes piqueurs (moustiques et mouches noires), utilisé depuis des années afin de réduire leur nombre, au grand plaisir des personnes qui profitent de l’extérieur. Dans la région immédiate, les municipalités de Mont-Tremblant, La Conception et Labelle ont opté pour l’épandage.
Introduit en 1982 au Québec, le Bti a été la cible, depuis, de nombreux programmes de contrôle. Les études les plus anciennes remontent aux années 1980-1990 et elles affirment généralement que le Bti n’a pas d’effets directs sur la faune vertébrée. Récemment, certaines études démontrant que l’épandage du Bti pouvait entrainer des impacts directs sur certains groupes d’organismes non ciblés ou sur les écosystèmes ont toutefois parues, lançant un débat qui n’est toujours pas tranché.
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Qui sont lesdits 22 organismes ?
Eau Secours
Nature Québec
SNAP Québec
Action Environnement Basses-Laurentides
L’Association de protection de l’environnement des Hautes-Laurentides
L’Association pour la protection de l’environnement du Petit Lac Nominingue
La Fondation Rivières
QuébecOiseaux
Le Club des Ornithologues de la Région de l’Amiante
Le Club d’ornithologie de la Côte-Nord
Le Club d’ornithologie de Trois-Rivières
Le Club des ornithologues de l’Outaouais
Le Réseau des femmes en environnement
ENvironnement JEUnesse
Les AmiEs de la Terre de Québec
La Société de conservation ZICO de la Baie-de-Gaspé
La Municipalité de Saint-Aubert
Vigilance OGM
Naaturaalik Consultants
Le CRÉ de Laval
L’Alliance pour l’interdiction des pesticides systémiques
La Société de Biologie de Montréal
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