Renouée du Japon
Entrer en guerre contre un ennemi déjà bien installé
La renouée du Japon est l’une de ces plantes envahissantes ayant réussi à se faire des ennemis partout sur la planète. En Amérique du Nord depuis 1860, nos municipalités devraient-elles aujourd’hui entrer en guerre contre cet envahisseur?
Ô qu’elle est belle! De prime abord, cette plante volumineuse à croissance rapide a de quoi séduire. Sous ses airs de bambou à fleurs blanc crème se cache pourtant un système racinaire toxique, qui empêche tous les autres végétaux de pousser. Ainsi la colonie s’élargit. Ou plutôt, le clone se multiplie. Les botanistes parlent de racines de type rhizomes, qui se déploient sur plusieurs mètres, passent même sous la chaussée, afin de créer plus loin des satellites. Elles envahissent les berges et les terrains ouverts, ne respectent ni le milieu naturel ni les frontières.
Répandue
La renouée du Japon est présente dans la région. Sur 18 municipalités interrogées, une douzaine ont répondu à nos questions sur cet enjeu, dont Val-Morin, Val-David, Saint-Donat, Sainte-Agathe-des-Monts, Saint-Faustin-Lac-Carré, Lac-Supérieur, Mont-Tremblant, La Conception et La Minerve, lesquelles ont d’emblée reconnu la présence de l’envahisseur sur leur territoire respectif. Répandue dans le sud du Québec, comment s’est-elle rendue jusqu’ici?
« Il est important de noter que la majorité des plantations ont été faites par les citoyens, car c’est une plante ornementale », souligne-t-on du côté de la Ville de Sainte-Agathe-des-Monts. Claude Lavoie, professeur à l’Université Laval et conseiller au ministère de l’Environnement en matière de plantes exotiques envahissantes, abonde dans le même sens. Il explique en entrevue téléphonique que le premier facteur de prédiction de la présence de la renouée du Japon est bel et bien la présence humaine.
Une fois installée, la renouée du Japon est là pour de bon. Il est presque impossible de s’en débarrasser. À moins d’avoir sous la main de la machinerie lourde et quelque 15 000 $ à dépenser par jour, indique le spécialiste. « Je ne connais pas de plante plus coriace que ça au Québec. J’ai des fragments de rhizomes de 0,1 g qui ont résisté à tous mes traitements. »
Qui a la responsabilité d’agir? « Hormis les initiatives locales, le programme de 8 M$ sur 5 ans géré par la Fondation de la Faune, c’est tout ce qui existe dans la lutte pour l’ensemble des espèces exotiques envahissantes (EEE) du Québec, dont la renouée du Japon », dit Claude Lavoie. Même si cette plante attire l’attention des gestionnaires d’infrastructures et des chercheurs, aucune stratégie concertée n’est mise de l’avant.
La meilleure arme
La prévention est la meilleure arme contre l’invasion de cette plante originaire d’Asie. Des employés des travaux publics reçoivent des formations leur permettant d’identifier la renouée du Japon et d’éviter les erreurs de manipulation; c’est le cas notamment à Sainte-Agathe, Lac-Supérieur, La Conception, Val-Morin et La Minerve. Cette approche éducative n’est pourtant pas la norme, alors que l’espèce voyage aisément par transport de remblais. Le ministère des Transports a d’ailleurs fait ce « cadeau » à Lac-Supérieur il y a quelques années. Aujourd’hui, la renouée du Japon s’y sent chez elle.
« Sans être hors de contrôle, la situation suscite certaines préoccupations, écrit Sophie Gauthier, porte-parole régionale pour le ministère de l’Environnement. L’espèce gagne du terrain, entre autres parce qu’elle profite de l’allongement de la saison de croissance, et parce qu’elle continue d’être propagée par des citoyens qui ne sont pas informés de son caractère extrêmement envahissant. »
Claude Lavoie est catégorique. La première étape de la lutte contre la renouée du Japon c’est d’avoir une carte de sa présence sur son territoire. Or, la vaste majorité des municipalités interrogées n’ont pas d’inventaire exhaustif sous la main. L’outil de détection Sentinelle permet de colliger les observations citoyennes, mais plusieurs zones envahies de la région ne s’y trouvent tout simplement pas.
Principaux conseils pour contrôler la renouée du Japon
- Signaler la présence de la renouée du Japon à votre municipalité.
- Agir dans les plus brefs délais afin d’éviter sa propagation en l’arrachant.
- Placer tous les résidus de la plante (tiges, feuilles, racines, terre, etc.) dans des sacs noirs et les disposer dans un dépôt prévu à cet effet par votre ville pour l’enfouissement technique, la biométhanisation ou la biomasse pour production énergétique.
- Ne pas la composter et ne pas la disperser dans l’eau.
- Nettoyer tous les équipements qui ont été en contact avec la plante (gants, souliers, pelle, pneus de voiture, etc.).
- Assurer un suivi rigoureux.
(Source: Conseil québécois des espèces exotiques envahissantes)
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