Qui a peur de la tordeuse des bourgeons de l’épinette ?
La Direction de la protection des forêts prévoit que les infestations de tordeuse des bourgeons d’épinette se poursuivront en 2020 sur la Côte-Nord, au Saguenay-Lac-Saint-Jean puis en Abitibi-Témiscamingue. Pendant ce temps, le cas des Laurentides continue d’étonner.
La tordeuse des bourgeons de l’épinette est cet insecte dont la larve s’alimente du feuillage annuel de l’épinette, mais aussi du sapin. Jusqu’ici rien d’alarmant. La petite chenille, au départ pas plus longue qu’un grain de riz, attend que les nouvelles pousses tendres de ses arbres préférés se déploient. Vers la fin juin, c’est là que l’histoire se gâte. Les dégâts deviennent apparents alors que les aiguilles de l’année sont complètement mangées, et que le bout des branches se tord. L’effet peut être dramatique.
Le foyer laurentien
Au Québec, l’épidémie de la tordeuse des bourgeons de l’épinette se poursuit. À l’instar d’un feu de forêt, des foyers sont répertoriés dans l’est de la province, mais aussi en Abitibi puis nouvellement en Outaouais. Pierre Therrien, entomologiste au ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs depuis belle lurette, nous parle du cas particulier des Laurentides.
À Sainte-Adèle, seul foyer de la région, ce n’est pas tant la surface infestée qui étonne, surtout lorsqu’on la compare à ce qui est observé par survol aérien notamment en Gaspésie. Pierre Therrien souligne que la particularité du foyer laurentien, suivi de près depuis 2008, est qu’il ne « contamine » pas les territoires adjacents.
« Ces papillons se déplacent en migration de masse parfois sur des centaines de kilomètres et c’est très difficile de prédire où ils iront. Cela peut dépendre des vents ou de la météo. »
Pierre Therrien, entomologiste.
Pourquoi seulement Sainte-Adèle et pas Val-Morin ou Sainte-Agathe ou Mont-Tremblant ? « C’est la question à un million de dollars! », s’exclame l’entomologiste. C’est peut-être une question de température ou de peuplement forestier. Bien malin qui pourrait le savoir. Et Pierre Therrien refuse de jouer au devin ou pire, à l’alarmiste.
L’absence de foyers d’infestation ailleurs qu’à Sainte-Adèle ne veut pas dire que le territoire adjacent est à l’abri ou exempt de tordeuses des bourgeons de l’épinette. On peut effectivement rencontrer ailleurs un arbre colonisé par l’insecte ravageur. Mais il ne faudrait pas paniquer.
« Un sapin peut soutenir 5 ans de défoliation grave avant que cela n’entraîne sa mort. Et pour l’épinette, c’est plus long encore. » Pierre Therrien explique que le ministère intervient seulement dans les zones où un grand pan de l’économie régionale dépend de la forêt. Alors l’épandage d’un biopesticide à Sainte-Adèle ne fait partie de leurs plans. Le même produit, souvent vendu sous l’appellation « lutte biologique », est disponible en jardinerie pour usage domestique.
« Depuis 1974, on a pris une approche au ministère où insectes et maladies font partie de l’écosystème forestier. Cela donne des forêts plus en santé, car les arbres faibles laissent leur place », conclut l’entomologiste.
Les observations citoyennes de tordeuse des bourgeons d’épinette peuvent être rapportées au ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs.
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